Passionnée de mode et des communications c’est d’abord en tant qu’enseignante du français qu’Audrey Morissette a commencé sa carrière professionnelle. Toutefois, elle ne pouvait abandonner l’idée de posséder sa propre boutique et c’est en se fiant à son instinct qu’elle créa en mai 2014, la charmante boutique Vestibule, qui est rapidement devenue l’adresse chouchou de bien des jeunes femmes. Rencontre avec une jeune entrepreneure qui démontre qu’il ne faut jamais laisser la peur de l’inconnu mettre fin à ses rêves.

1.Parle-nous un peu de ton parcours personnel.

Quand je devais m’inscrire à l’Université, je ne savais pas trop dans quel domaine me diriger. Les communications et la mode m’interpellaient beaucoup, mais j’avais souvent entendu que dans ces domaines, c’était très difficile d’avoir un bon emploi en sortant et que tu te retrouvais souvent pigiste à faire au final des choses que ne t’intéressaient pas réellement. Je manquais à ce moment d’expérience de vie, je me suis donc fiée à ce que j’avais entendu et je me suis inscrite en enseignement du français au secondaire. J’aimais aussi beaucoup le français et je donnais des cours privés depuis l’âge de 15 ans à ceux qui avaient de la difficulté, c’était donc un choix qui allait de soi pour moi. Durant mon BAC, j’ai souvent eu envie de changer de branche et d’aller en communications ou en mode, mais j’avais peur de m’écouter et d’aller vers ce qui était inconnu et je me disais que puisque j’avais commencé en enseignement, j’allais le faire jusqu’au bout.

J’ai donc terminé mon BAC et en sortant, j’ai tout de suite commencé à enseigner le français à temps plein. C’est pendant ma première année d’enseignement que j’ai commencé à ressentir l’envie d’être propriétaire de ma propre boutique. Chaque fois que j’entrais dans une boutique que j’aimais, je me disais à moi-même combien la propriétaire était chanceuse et combien sa vie devait être parfaite. Ça m’interpellait énormément et ensuite, cette idée est restée bien ancrée dans ma tête, au point où je n’avais plus le choix de suivre cette voie et d’essayer de réaliser mon projet.

2. Qu’est-ce que qui t’a poussé à lancer Vestibule?

Au départ, Vestibule était supposé être une boutique de vêtements seulement, mais au fur et à mesure que je travaillais sur mon projet, je réalisais à quel point ça pouvait être difficile pour les petites boutiques de faire compétition avec les grandes chaînes et puisque j’avais un aussi grand intérêt pour la décoration que pour la mode, j’ai décidé de rediriger mon projet dans cette voie pour monter une boutique d’articles de décoration pour la maison. Finalement, ayant fait toute la recherche et le travail pour les deux domaines, je me suis dit que ce serait bien de combiner les deux et d’offrir sous un même toit tout ce que j’aimais: vêtements, déco, lingerie, cadeaux, soins…bref, pas mal tout ce que les filles aiment habituellement! En plus, ce concept n’était pas beaucoup présent autre que pour la grande chaîne Anthropologie, à laquelle on nous compare souvent d’ailleurs.

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3. Depuis combien de temps es-tu à ton compte? Qu’est-ce que tu aimes le plus du fait d’être une femme en affaires? Le moins? 

Cela fait maintenant 3 ans que je suis à mon compte. J’adore le fait que je puisse gérer mon propre horaire et décider de ce que je veux faire quand je veux le faire. Il n’y a personne qui me dit ce que je dois faire et ce qui est bien quand tu es à ton compte, c’est que tu es tellement motivée par ton projet et passionnée par ce que tu fais que tu n’as jamais l’impression de vraiment travailler. Tu en fais simplement le plus possible pour faire grandir ton entreprise et la mener à succès, je ne compte jamais mes heures et je ne vois pas le temps passer, peu importe ce que je fais.

Ce que j’aime le moins par contre est que pour l’instant, je travaille beaucoup seule. Je m’ennuie parfois d’avoir des collègues de travail qui comprennent et qui partagent ma réalité parce qu’ils font exactement la même chose que moi. En ce moment, quand j’ai des périodes de doute ou d’insécurité, je n’ai pas vraiment personne à qui en parler qui comprenne exactement ce que je vis. C’est quelque chose que je trouve encore aujourd’hui difficile à vivre.

4. Qu’est-ce qui te passionne le plus de ton métier?

Magasiner et faire ma sélection des produits qui seront offerts en boutique est vraiment ce qui me passionne le plus! Il faut dire que je suis une maniaque du magasinage et que je pourrais passer ma vie à faire ça sans jamais me lasser, c’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles j’avais envie d’avoir ma propre boutique: maintenant, magasiner fait partie de mon travail, c’est parfait! Ensuite, j’adore conseiller mes clientes et les aider quand elles ont besoin d’aide pour trouver une tenue ou un cadeau original à offrir. Chaque produit en boutique a été sélectionné avec amour et toujours par coup de coeur, c’est donc facile pour moi de transmettre ma passion à mes clientes et j’aime leur en apprendre plus sur l’origine et l’histoire de nos produits, dont plusieurs sont d’ailleurs faits ici, au Québec.

5. Quelles ont été les difficultés que tu as rencontrées depuis que tu t’es lancée en affaires? Y a-t-il quelque chose que tu ferais différemment?

Depuis le début de cette aventure, j’ai rencontré beaucoup de difficultés et je dirais même que chaque semaine, il y a encore des obstacles et des situations à gérer. Quand on devient entrepreneur dans un domaine où on n’a pas vraiment d’expérience, on apprend sur le tas, ce qui veut nécessairement dire qu’on fait aussi des erreurs et qu’on apprend de celles-ci. En même temps, c’est aussi ce qui fait qu’on ne se lasse pas de ce qu’on fait parce que chaque journée présente ses nouveaux défis. Si c’était à refaire, je prendrais peut-être une ou deux années à aller travailler pour quelqu’un d’autre pour voir comment se passent les choses et pour avoir de l’expérience avant de démarrer mon projet.

Une des difficultés rencontrées au tout début a aussi été pour nous de sélectionner notre emplacement. On ne voulait pas faire d’erreur et ça n’a pas été évident. Ça nous a pris 8 mois avant de nous décider et on était même prêts à déménager pour ce projet-là (on avait étudié la possibilité de nous installer à Québec). Toute la démarche de négocier le bail et d’aménager l’intérieur a été un peu éprouvante pour nous. Si c’était à refaire, je ferais affaire avec un agent immobilier pour nous aider à bien négocier toutes les clauses du bail et j’engagerais aussi un designer d’intérieur pour nous guider dans les travaux d’aménagement. Au début, cela me faisait peur parce que c’était des coûts importants, mais j’ai dû changer plusieurs aspects de l’intérieur de la boutique parce que je n’aimais pas ça au final et j’ai donc payé en double les travaux.

6. Quelles sont les plus grandes leçons que tu as apprises depuis tes débuts?

Une des plus grandes leçons que j’ai apprises et sur laquelle je continue de travailler chaque jour est le fait d’essayer gérer le mieux possible le stress qui vient avec le fait de se partir en affaires. Quand ton entreprise repose sur tes épaules, la pression devient assez forte et dès qu’il y a quelque chose qui ne va pas comme tu le voudrais, l’angoisse peut facilement prendre le dessus. Pour moi, ça a été une chose sur laquelle j’ai dû travailler. Apprendre à gérer mon stress de façon positive, être capable de laisser aller un peu plus, comprendre que je ne peux pas tout contrôler à 100% et que tout ne sera pas parfait tout le temps, ce n’est pas facile à faire. Quand tu es un peu perfectionniste, c’est très difficile de déléguer et de se dire que les choses seront bien faites, mais à un moment donné, tu réalises que c’est impossible de tout faire soi-même. Il est donc très important pour moi de prendre du temps pour me reposer, prendre du recul et remettre les choses en perspective. Ensuite, je reviens toujours plus motivée et plus forte.

7. As-tu eu recours à du financement? Si oui, de quelle manière as-tu financé ton projet?

Pour Vestibule, nous avons investi personnellement dans le projet. Nous n’avons donc pas eu recours à des prêts des banques. Toutefois, quand Vestibule sera prête à prendre de l’expansion, il est certain que nous aurons recours à du financement extérieur. Pour la vente au détail et la restauration, je sais qu’il est très difficile d’avoir du financement des banques parce que le risque est très élevé. Ton plan d’affaires se doit donc d’être très solide et très bien préparé.

8. À quoi ressemble une journée au bureau?

Depuis mon ouverture, mes semaines typiques ont beaucoup évolué et ça continue encore de changer au fil du temps. Au début, je faisais presque toutes les heures à la boutique à faire du service à la clientèle et à placer des commandes en ligne quand j’avais un peu de temps libre. J’ai fait ça pendant au moins 6 mois. Ensuite, je me suis rendu compte que j’avais besoin de plus de temps pour faire progresser Vestibule, pour développer et affiner mon projet pour pouvoir être en mesure de l’amener vers ce que j’avais en tête. Par exemple, j’avais besoin de temps pour développer la boutique en ligne (gros morceau) et pour penser à des façons de faire parler de la boutique pour nous faire connaître et quand je faisais du service à la clientèle en boutique, je n’avais pas le temps de me concentrer sur le reste, mais qui est aussi primordial. J’ai donc engagé plus de personnel et je me suis mise à travailler là-dessus pour un bon bout de temps. Aujourd’hui, ça dépend vraiment des périodes. Il y a des mois où je sens que je dois recommencer à être plus présente à la boutique pour guider mes employées et pour que les clientes sentent qu’il y a quelqu’un qui s’occupe bien de la boutique et il y a d’autres mois où je sens que je dois à nouveau prendre du temps pour développer la boutique et trouver de nouvelles idées à exploiter. En ce moment, je travaille à la boutique chaque jeudi et j’y vais aussi souvent la fin de semaine parce que ce sont les journées les plus achalandées. Le reste de la semaine, je divise mon temps entre aller à mes rendez-vous pour faire les achats, répondre et faire le suivi des courriels et des demandes des clientes, travailler sur la boutique en ligne et sur les fiches produits, améliorer le processus d’envoi des colis des commandes en ligne et créer du contenu pour le blogue.

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9. Tu travailles dans la vente au détail, ce qui n’est pas toujours facile. Comment  s’assurer d’une longue carrière dans ton industrie?

Je crois qu’il n’y a pas de formule magique. Tu dois travailler très fort pour te démarquer, pour être original et pour continuer à faire parler de toi. Avoir des partenariats avec des ambassadeurs est une façon que je privilégie et que j’aime beaucoup. Quand une personnalité que tu aimes parle en bien d’une entreprise, c’est toujours positif et ça met les gens en confiance. C’est parfois ce qui fait que les gens se déplacent pour venir en boutique. Ensuite, c’est sûr que le service à la clientèle doit être impeccable et personnalisé, c’est ce qui fait que les gens vont revenir et parler en bien de nous.

10. De quoi es-tu le plus fière?

Je suis fière d’avoir été capable de partir de zéro une entreprise dans un domaine que je ne connaissais absolument pas et qu’un an plus tard, le nom Vestibule soit relativement assez connu au Québec et tout ça, avec un budget assez restreint. Les clientes sont tellement gentilles et on se fait très souvent complimenter sur la boutique. Régulièrement, les gens nous disent combien ils trouvent la boutique jolie et combien ils aiment notre offre de produits. C’est très encourageant et ça nous motive à continuer de nous dépasser pour offrir le meilleur à nos clientes.

Je suis aussi très fière de m’être écoutée et d’avoir pris mon courage à deux mains pour réaliser le projet que j’avais à coeur même si je devais laisser ma carrière de côté. C’était assez épeurant par moments, mais quoi qu’il arrive, je vais pouvoir dire que je l’ai fait et que je suis allée au bout de mes rêves.

11. Le meilleur conseil que tu aies reçu?

Les meilleurs conseils viennent toujours de mon mari. C’est toujours lui qui est présent pour me supporter et m’encourager et il a toujours les bons mots pour me pousser à continuer et à ne pas lâcher même si ce n’est pas toujours facile. Il joue un rôle très important pour moi à ce niveau, il est ma source de motivation.

12. À ton tour, quel(s) conseil(s) donnerais-tu à celles qui voudraient partir leur entreprise? Quelles habiletés sont nécessaires selon toi?

Je conseillerais à toutes celles qui désirent se lancer en affaires de bien prendre le temps de se préparer. Prendre l’expérience nécessaire et bien s’entourer avant de se lancer est pour moi primordial pour la réussite d’un projet à long terme. Il faut aussi être très entêté, avoir beaucoup de détermination et rester positif face aux obstacles.

13. Qu’est-ce que le succès pour toi?

Le succès pour moi réside dans le fait de pouvoir faire ce qu’on aime dans la vie. Peu importe ce que cela représente, si ce que tu fais chaque jour te rend heureux, c’est l’important.

14. À quoi peut-on s’attendre prochainement pour Vestibule?

Mon souhait pour Vestibule est que la boutique continue de se faire connaître et de tailler sa place dans l’industrie. Nous continuerons à travailler très fort pour que nos clientes soient contentes, qu’elles trouvent chez nous ce qu’elles ne peuvent pas trouver ailleurs et qu’elles reviennent d’année en année. J’ai toujours beaucoup de projets nouveaux pour Vestibule en tête, mais que je ne peux pas dévoiler pour garder la surprise. Ce sera donc à suivre au fil du temps!

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Pour en connaître davantage sur la boutique Vestibule, visitez le www.boutiquevestibule.com

Photos: Audrey Morissette